Dans le petit village de Virebois, on disait qu’à chaque nuit d’Halloween, un chien sans collier errait dans les rues. Personne ne savait d’où il venait, ni à qui il appartenait. On l’entendait avant de le voir : un souffle dans le vent, un léger grattement de griffes sur les pavés mouillés, puis un aboiement grave, résonnant comme un écho ancien.
Les enfants du village en avaient fait une légende. On racontait que c’était l’esprit d’un vieux chien de ferme, mort en cherchant son maître pendant la grande tempête de 1912. Depuis, il reviendrait chaque 31 octobre, cherchant encore la maison qu’il avait perdue.
Cette année-là, Léo, un petit garçon de dix ans, sortit malgré l’interdiction de ses parents. Il voulait le voir, le vrai chien sans collier. Il longea les haies sombres, éclairé seulement par sa lanterne citrouille. Tout était silencieux. Trop silencieux.
Puis, un souffle.
Un pas.
Un autre.
Au détour du chemin, deux yeux dorés le fixaient. Le chien était là : grand, au pelage gris argenté, presque transparent. Il ne grognait pas. Il s’assit simplement, la tête légèrement penchée. Léo tendit la main, tremblant.
— T’es perdu, toi aussi ? murmura-t-il.
Le chien posa doucement sa truffe contre ses doigts. Une chaleur étrange se répandit dans la main du garçon, comme un souvenir qui ne lui appartenait pas. Pendant une seconde, Léo vit des images : une ferme, un homme en bottes, une tempête, une porte qu’on claque. Puis tout disparut.
Quand il rouvrit les yeux, le chien n’était plus là. À ses pieds reposait un vieux collier de cuir, usé par le temps. Sur la plaque, on lisait :
“À mon fidèle compagnon, Rex. À jamais à la maison.”
Léo rentra en courant, le cœur battant. Le lendemain, il enterra le collier sous le vieux chêne du village. Depuis cette nuit, on dit que le chien sans collier ne hante plus Virebois. Mais chaque Halloween, si l’on écoute bien, on peut encore entendre un souffle joyeux dans le vent… comme un aboiement de remerciement.
Milgram & co 